Heureux ! N’est-ce pas le sens premier du mot Évangile, « bonne nouvelle », « béatitude » comme nous le disions dans notre langage courant en parlant de ce passage de Luc ? Luc éprouve, nous le savons, une prédilection pour les pauvres au sens concret du mot : rappelons les invités à la noce (les pauvres, les estropiés et les boiteux) ; le pauvre Lazare à la porte du mauvais riche ; l’invitation de l’homme riche à donner ses biens aux pauvres… Déjà chez Isaïe, les pauvres, les endeuillés sont évangélisés (61) : le pauvre se tourne vers Dieu.
Mais celui qui, par excellence, met sa confiance en Dieu, qui est pauvre, qui a faim, qui pleure, et finalement subit la persécution… c’est Jésus lui-même : il est affamé quand il est tenté au désert par le démon ; il pleure sur Jérusalem qui n’accueille pas le Messie ; c’est lui qui met sa confiance en Dieu alors même qu’il est rejeté des hommes. La première lecture tirée du livre de Jérémie insiste sur ce point. Ainsi, « Béni soit l’homme qui met sa confiance dans le Seigneur, dont le Seigneur est l’espoir ». Là, déjà, cet homme par excellence… c’est Jésus.
Que choisis-tu ? Quel est ton trésor ? Comme le demande Jérémie : en qui mets-tu ta confiance ? Ici éclate avec une vigueur particulière la vraie joie biblique, la joie du disciple qui est de vivre dans la proximité de Dieu, sans se laisser tromper par des consolations artificielles (« Malheureux les riches, les repus… ») et d’être témoin de son amour débordant. Il ne s’agit pas d’opposer bénédictions et malédictions, de prononcer un jugement irrévocable, mais au contraire, en exprimant une joie d’un côté, une plainte douloureuse de l’autre : en fait, un appel vigoureux à la conversion… Il n’est pas trop tard !
Père Richard ESCUDIER